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L'émeraude du Nil
5 février 2010

L'aspic de Cléopâtre

L'aspic de Cléopâtre - Tableau de Melle Heva Coomans

Cléopâtre, reine d'Egypte, était la fille de Ptolémée-Audète. Son père, en mourant, laissa la couronne aux deux aînés de ses enfants, un garçon et une fille, avec l'ordre de les marier ensembe, suivant l'usage de la famille. En l'an 51 avant J.-C. Ptolémée-Denys, frère de Cléopâtre, voulant régner seul, répudia et exila sa soeur, et fit casser le testament de son père par Pompée, qui lui adjugea le trône d'Egypte. Ce général romain ayant été vaincu vers le même  temps à la bataille de Pharsale, et fuyant l'Egypte devant César, y fut masscré par odre de Ptolémée. Ce fut en cette conjoncture que Cléopâtre demanda justice à son vaiqueur contre son frère. Elle parlait toutes les langues et n'eut jamais besoin d'interprète. Le conquérant romain la vit, et sa cause fut gagnée. Il ordonna qu'elle gouvernerait l'Egypte, conjointement avec son frère. Ptolémée s'étant noyé dans le Nil, César assura la couronne à Cléopâtre et à son autre frère, âgé alors de onze ans ; mais cette princesse ambitieuse ne partagea pas longtemps le trône avec lui : elle le fit empoisonner dès qu'il eût atteint sa quinzième année. Après la mort de César elle se déclara pour les triumvirs. Antoine, vainqueur à Philippes, la cita devant lui pour répondre à quelques accusations formées contre elle. Cléopâtre résolut dès lors de gagner Antoine à sa cause comme elle avait gagné César. La reine d'Egypte s'empara tellement de son esprit, qu'il fit mourir à sa prière la princesse Arsinoé, sa soeur, réfugiée dans le temple de Diane à Milet. Tout le temps qu'elle fut à Tarse se passa en fêtes et en festins. Ces fêtes se renouvelèrent à Alexandrie avec une magnificence dont il n'y a jamais eu d'exemple. Ce fut à la fin d'un de ces repas que Cléopâtre, détachant de son oreille une perle d'un prix inestimable, la jeta dans une coupe pleine de vinaigre, et l'avala aussitôt, pour dévorer en un moment autant de richesses qu'Antoine en avait employé pour satisfaire à leur luxe. Elle ne quittait jamais Antoine, jouant aux dés avec lui, buvant avec lui, chassant avec lui, et assistant à tous les exercices des armes.8353333_p
Plutarque raconte un fait qui peut donner une idée de la puérilité de ces amusements. Pêchant un jour à la ligne en présence de Cléopâtre, et humilié de ne rien prendr, il donna ordre à des pêcheurs d'aller sous l'eau attacher secrètement à son hameçon un des gros poissons pris auparavant.
La reine s'aperçut de la supercherie, et le lendemain elle fit accrocher à l'hameçon d'Antoine un poisson salé. A la vue d'une telle prise, grands éclats de rire. Alors Cléopâtre dit à Antoine : "Mon général, laissez-nous la ligne à nous, souverains du Phare et de Canope ; votre pêche à vous ce sont les villes, les peuples et les empires." Un voyage d'Antoine à Rome interrompit ces fêtes. Cléopâtre, pendant ce temps, rétablit la bibliothèque d'Alexandrie, brûlée quelques années auparavant, et l'augmenta de celle de Pergame, composée de plus de deux cent mille volumes. Antoine, de retour à Alexandrie, y entra en triomphe,et fit proclamer Cléopâtre reine d'Egypte, de Cypre et de la Célésyrie. Il ne pouvait rien lui refuser. Ce fut uniquement pour lui plaire qu'il répudia sa femme Octavie, soeur d'Octave, ce qui fut le signal de la guerre civile. On arma de part et d'autre. Cléopâtre fit équiper cinq cents vaisseaux, et voulut les commander en personne. Les flottes des deux partis se rencontrèrent à l'entrée du golfe d'Ambrasie, sur les côtes d'Epire, près de la ville d'Actium, et en vinrent aux mains le 2 septembre, l'an 34 avant J.-C.
Le combat fut douteux jusqu'à la retraite de Cléopâtre. Cette reine, effrayée du tumulte et des cris des combattants, prit la fuite et entraîna toute son escadre avec elle. Antoine, qui la vit fuir, la suivit et céda une victoire qu'il aurait pu disputer. Cléopâtre prit la route d'Alexandrie, où Antoine se rendit peu à près. Cette reine ambitieuse, pour ne point tomber entre les mains du vainqueur qui assiègeait la capitale et s'étant aperçue qu'Octave voulait s'assurer de sa personne et de ses trésors, ramassa toutes sortes de poisons, pour éprouver ceux qui faisaient mourir avec le moins de douleur.
Après beaucoup de recherches, elle trouva que la morsure de l'aspic avait l'avantage de ne causer ni convulsions ni tranchées. Ce fut celui auquel elle se fixa. Ainsi, dès qu'elle eut appris qu'Antoine s'était percé de son épée, elle demanda une corbeille de fleurs qu'une esclave venait d'apporter, et l'ayant apporchée d'elle, on la vit un moment aprés se coucher sur un lit, comme pour s'endormir ; l'aspic qui était caché parmi les fleurs, l'ayant piqué au bras qu'elle lui avait tendu, le venin la fit peu après mourir sans douleur, l'an 30 avant Jésus-Christ. Plutarque et Dion écrivirent qu'on n'a jamais rien su de certain de la mort de Cléopâtre ; qu'on lui trouva seulement au bras deux petites marques livides, comme deux piqûres, qui donnèrent lieu de croire qu'elle s'était fait mordre par un aspic. On peut douter d'ailleurs que la morsur de ce serpent pût produire l'effet qu'en attendait Cléopâtre. Les gens d'Octave étant accourus, la trouvèrent mourante, parée de ces habits royaux et couchée sur son lit d'or. Des deux femmes qui la servaient, la première est morte à ses pieds, et l'autre, appelée Charmion était mourante. "Voilà qui est beau, Charmion," lui dit un des officiers d'Octave... "Oui, répondit-elle, et très digne d'une princesse issue de tant de rois."
Elle avait trente-neuf ans, et en avait régné vingt-deux. Les statues d'Antoine furent abattues, mais celles de la reine d'Egypte furent conservées, à la prière d'Archibius, l'un de ses amis, qui donna mille talents à Octave pour épargner cet outrage à la mémoire de cette femme extraordinaire. Après sa mort l'Egypte fut réduite en province romaine.

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